Le Népal, c’est un pays simple complexe. C’est un pays où les extrêmes se confondent et où les traditions vont de pair avec la modernité. Cela ne fait environ que 60 ans ans que ce pays enclavé entre les puissances mondiales que sont la Chine et l’Inde a ouvert ses portes aux touristes et tâche de s’adapter à ce que cela représente. On me l’avait dit : il n’y a vraiment aucun pays comme le Népal.
Déjà, en arrivant à Kathmandu, les boîtes contenant nos vélos ont été égarées quelque part en chemin. Essaie de faire comprendre que ce que tu as perdu ce n’est pas réellement un vélo mais en fait une grosse boîte avec un vélo dedans. Et le gentil monsieur des objets perdus de nous ouvrir une porte donnant sur un entrepôt gigantesque ne contenant que des bagages jamais réclamés. Il y en a pour tous les goûts!
Pas de panique, les vélos arrivent le lendemain et notre énergie peut maintenant se diriger vers la première étape de notre périple : un trek dans la région du Langtang, connue et appréciée pour sa vallée où coule la rivière du même nom. Ne faisant jamais rien à moitié, nous décidons d’enchaîner trois treks « back-to-back » et ce, malgré le fait que c’est encore l’hiver et qu’on ne sait pas trop si les cols sont praticables.
Qu’a cela ne tienne, nous partons. La ride d’autobus. Parlons-en. Imaginez passer sept heures dans une montagne russe où le conducteur s’amuse à accélérer avant les tournants et où du hublot on aperçoit plus souvent le vide que la « route » (ici désignée par une chaussée de terre compactée quelquefois détruite par un glissement de terrain). C’est une ride mémorable où tu hésites à ouvrir la fenêtre parce que tu gèles mais que tu te décides finalement à l’ouvrir car les odeurs de vomis faits dans de petits sacs de plastique rose embaument l’habitacle. Oui, oui, même les Népalais passent au cash. (Mais pas nous, parce qu’on est tough!)
Nous disions donc, trois treks, donc trois expériences totalement différentes. Le premier, plus culturel, le deuxième, « l’incontournable », et le dernier, le sportif. De Syabrubesi, nous partons sur la Tamang Heritage Trail, trek ouvert il y a 5 ans afin que les touristes apportent un peu de richesse dans une régions plus reculée où les gens d’origine Tamang, peuple bouddhiste venant du Tibet ayant leur langue et culture propres, vivent depuis des siècles. En quatre jours, plusieurs choses nous étonnent : primo, aucun touriste en vue et la plupart des lodges ne sont pas ouvertes; deuzio, les impressionnants villages à flanc de montagne où les maisons construites en pierre sèche semblent dater du dernier siècle; et terzio, les habitudes n’ont pas tellement changé et on peut encore voir des femmes battre leurs céréales à la main à l’aide d’un fouet de bois pour en extraire le grain. Cela contraste avec les enfants que nous rencontrons et qui regardent leur portrait sur notre caméra en essayant de faire glisser les photos avant de comprendre qu’elle fonctionne avec de simples boutons! Eh non, notre caméra n’est pas tactile!
Nous avons ensuite la chance de littéralement marcher dans un mariage Tamang. En remontant une vallée vers Ling Ling, nous arrivons sur une place où une multitude de drapeaux de prières colorent le ciel et où l’ambiance euphorisante est palpable. Dans le temps de le dire, nous sommes invités à participer à la fête, on nous offre à boire du chang et à manger du daal bhat. Bon, notre après-midi est réglé, nous sommes invités par Budjun à rester chez lui à Briddim et à assister aux chants et à la danse entre-temps. Nous sommes aux anges, heureux de faire partie d’une tradition si authentique et de se faire accueillir si gentiment. En donnant un « cadeau » aux mariés, on se fait dire que tout est gratuit et que c’est leur plaisir de nous recevoir. Touchés par cette grande générosité, nous sommes donc plutôt surpris et déçus lorsqu’au moment de quitter le lendemain, on se fait demander par notre hôte une somme de 1000 rps pour le gîte et le couvert. Nous qui pensions être des invités, nous nous trouvions simplement dans la peau de clients et ce que nous pensions être un désir sincère de partage n’était que le business habituel.
C’est donc un peu refroidis que nous avons entamés notre trek dans la vallée du Langtang. Surtout que le chang du mariage nous fait appeler l’orignal (manière plus poétique de dire que tout est sorti par les deux bouts). Le trek du Langtang est reconnu pour sa simplicité : c’est un aller-retour d’une semaine jusqu’à Kyanjin Gompa (3800m) où le trekkeur marche à travers la forêt dense et où le ronronnement de la rivière est omniprésent. Bref, c’est beau, mais les panormas ne sont pas spectaculaires et le chemin est assez linéaire. C’est à ne pas comprendre pourquoi les gens y viennent avec guides et porteurs... Bon d’accord, ce n’est pas la grande aventure himalayenne mais la marche est agréable et on se mérite quelques beaux clichés rendus à Kyanjin Gompa.
C’est plutôt sur la route vers les lacs Gosainkund que nous apercevons réellement la beauté du massif du Langtang. Avouons-le, cela fait plus de dix jours que nous marchons et nous commençons à être fatigués. En partant de Thulo Syabru, nous sommes rassurés, car nous nous faisons dire que le col Laurebina, qui nous permettra de redescendre vers la vallée de Kathmandu, est praticable. En trois jours, nous grimpons de 3000m alors au diable la fatigue, on continue! Les nuages se mettent également de la partie. À notre arrivée à Laurebina Yak (3900m), nous avons le droit à une belle tempête de neige où la grêle s’immisce même dans les nombreux trous du lodge. Après cette froide nuit, nous sommes résolus à redescendre, et cela uniquement de l’autre côté du col, peu importe la neige accumulée!
Quelle journée! C’est un vent à écorner les yaks qui nous attend lors de notre montée vers le col. Aujourd'hui, nous serions supposer nous arrêter aux Lacs Gosainkund, 200m plus bas que le col, mais en voyant que le ciel est clair en matinée, nous voulons profiter de cette fenêtre pour traverser. Évidemment, le chemin a été englouti par la neige et c’est en suivant de petits tas de pierres qui ressemblent à des inukshuks que nous entamons la route vers le col. C’est peut-être parce que nous sommes fiers d’être Québécois, mais on s’est dit que la neige, on connaît ça pis que ça nous fait pas peur! Contrairement à tous ceux que nous avions rencontrés en chemin et qui avaient décidé de rebrousser chemin à cause des mauvaises conditions, nous autres, on a tenté le tout pour le tout!
C’est dans une neige épaisse et ressemblant à du « styrofoam » que nous marchons pendant toute la journée. Rendus au col, 2h15 après avoir quitté Gosainkund, nous sommes fatigués et de l’autre côté du col, d’immenses nuages gris ne présagent rien de bon. Pas le temps de sortir l’appareil photo, il faut vite redescendre! Nous sommes chanceux, nous rencontrons en chemin un Népalais qui possède un lodge à Phedi, 1000m plus bas, et il nous accompagne jusqu'à celui-ci. Ensuite, durant les 3 jours que durent la descente vers Sundarijal, le nuage que nous avons vu du col ne nous quitte pas et c’est dans cet épais brouillard que se termine notre trek.
Voulant rentrer à temps à Kathmandu pour assister à la célèbre fête hindoue de Shivaratri au plus important ensemble de temple hindus du Népal, Pashupatinath, nous bouclons en six jours un trek qui en prend normalement huit. Nous ne sommes pas déçus. Pour l’occasion, plus de 3500 policiers déployés, 5000 sâdhus venant de l’Inde et du Népal et surtout, plus d’un million de fidèles venant célébrer la naissance de Shiva. Alors que le matin, nous avions visité la plus grosse Stupa bouddhiste du Népal, Bodnath, entourés d’innombrables moines, nous nous trouvions en après-midi entourés de toute la ferveur hindue. Une file interminable de gens voulant entrer à Pashupatinath, des crémations humaines sur le bord de la Bagmati, une marée humaine célébrant à leur manière leur spiritualité, c’est ce à quoi ressemble Shivarati à Kathmandu.
Après toute ces aventures, c’est avec joie que nous retrouvons le calme relatif de Thamel et surtout, sa variété culinaire! Deux semaines de riz et de lentilles, ça s’oublie vite avec de la bière (surtout pour Yan!) Un peu de repos, et dans quelques jours, le père et le cousin de Yan nous rejoignent pour aller explorer pendant trois semaines la région du Khumbu (ça, c’est l’Everest). Avec tous mes globules rouges, regarde moi ben monter ça cette petite montagne là! Namaste!